​Extrait : 

Chaque détail de cette journée, à l'orée incertaine, lui revenait en mémoire : la gare de Shibuya ; elle se revoyait, comme à son habitude, prendre la sortie Hachikō, puis traverser Shibuya Crossing, rejoindre la Tour 109-2 -temple des fashionistas -, en parcourir les dix étages, flâner devant les vitrines de ses magasins fétiches : Cecil McBee, Dolce Rosa, Ank Rouge, avant de rejoindre Kensakuen. 

[...] 

Il était à présent 4.39 pm, le soleil s'échappait au loin dans le ciel de Tokyo en ce mois de

novembre. Hisae, les yeux semi-clos, aperçut les perles de son collier rouler au sol et l'hibiscus

s'éloigner d'elle flottant au grè du vent léger sur une immensité rouge. Elle repensa alors à ces

dimanches de printemps, quand elle était encore une enfant, les balades dans le parc de

Koishikawa-Kōrakuen, elle aimait marcher sur les pierres chaudes de l'étang, traverser le pont, s'asseoir, contempler les cerisiers en fleurs et assister aux spectacles de marionnettes Bunraku... Avant de clore les yeux une dernière fois, elle observa la fleur tourbillonner ; la douleur la quittait progressivement, la rue autour d'elle s'effaçait, la verdure gagnait l'espace. Elle revit sa

mère assise auprès d'elle et les feuilles pourpres des érables, aux premiers jours d'automne, voguer

sur l'étendue du lac.